
La langue française est une langue diversifiée et en constante évolution. Elle peut être utilisée en tant que ressources pour assurer une représentation équitable de l’ensemble des membres de la société.
Adopter un langage inclusif, autant à l’oral qu’à l’écrit, implique de porter attention aux mots et aux contenus qui sont communiqués, afin d’assurer l’inclusion et de prévenir toute forme de discrimination fondée sur des facteurs identitaires, tels que l’origine culturelle, l’handicap, l’identité de genre, l’orientation sexuelle, etc.
Le gouvernement du Canada, qui reconnait l’importance des questions liées à la représentation équitable des genres dans la langue française, propose dorénavant des Lignes directrices sur l’écriture inclusive ainsi que l’Inclusionnaire : reccueil de solutions inclusives.
Dans sa politique P-104, le CSF affirme son engagement à valoriser la diversité des orientations sexuelles, des identités de genre et des expressions de genre en assurant une visibilité aux personnes 2SLGBTQIA+, notamment dans le langage utilisé dans les communications et enseigné dans les écoles.
« Le CA s’engage à s’efforcer d’utiliser une langue française qui soit inclusive des personnes de diverses identités de genre. » – P-104 / Équité (p. 2)
Il est donc essentiel que le personnel scolaire adopte et modélise des pratiques lingustiques inclusives pour désigner les groupes diversifiés, les personnes dont on ne connait pas l’identité de genre et les personnes non binaires.
Dans cet article, vous trouverez des stratégies, des pistes d’action et de réflexion, ainsi que plusieurs ressources pour vous outiller et vous familiariser avec des principes et des procédés qui permettent de communiquer de façon inclusive en français.
La langue française a toujours évolué en fonction des contextes et des besoins propres à des communautés particulières.
Les travaux liés à la féminisation des titres de fonction et la promotion de la rédaction épicène ont permis de représenter les femmes et les hommes de manière égalitaire et de remplacer l’usage du masculin générique qui est maintenant déconseillé par le gouvernement fédéral et l’Office québécoise de la langue française.
Toutefois, ces pratiques, basées sur le modèle binaire féminin-masculin, ne permettent pas de rendre visible ou audible l’identité des personnes non binaires. Il y a désormais un réel besoin d‘adopter un ensemble de pratiques linguistiques inclusives pour représenter équitablement la pluralité et la diversité des genres.
« Il existe aujourd’hui un large consensus sur l’importance d’écrire de manière inclusive afin de favoriser l’égalité et d’encourager la participation de l’ensemble des membres de la société. » – Gouvernement du Canada
En Colombie-Britannique, un projet de loi a été déposé afin de modifier les termes genrés qui se trouvent dans les lois provinciales, en tenant compte de l’équité et de la diversité des genres.
Pour un survol historique, consultez Aux sources de l’écriture inclusive (Blogue Nos langues).
Les Lignes directrices sur l’écriture inclusive du gouvernement fédéral présentent un ensemble de principes et de procédés qui visent à inclure et représenter explicitement la diversité des genres.
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Formulations neutres
Les formulations neutres font appel à une combinaison de procédés, dont des choix de mots et des tournures de phrases qui ne précisent pas le genre des personnes concernées.
- Les noms collectifs : Ce sont des noms communs, généralement singuliers, qui désignent un ensemble de personnes (ex : le personnel scolaire, la direction, le corps enseignant, le groupe, l’équipe, la communauté).
Pour plus d’exemples : Écriture inclusive : noms collectifs
- Les mots épicènes : Ce sont des noms communs, des adjectifs ou des pronoms qui désignent tous les genres sans changer de forme.
– Noms (ex : une personne, l’enfant, l’adulte, les camarades, les spécialistes, les collègues)
– Adjectifs (ex : drôle, adorable, dynamique, habile, triste, calme, brave, serviable)
– Pronoms (ex : vous, on, quiconque, plusieurs, qui, personne)
Pour plus d’exemples : Écriture inclusive : mots épicènes et Liste de termes épicènes
- Les reformulations : Elles consistent à employer diverses stratégies pour modifier les mots et la structure d’une phrase afin d’éviter les tournures et les accords genrés (ex : « La participation des élèves est encouragée » plutôt que « Les élèves sont encouragés à participer »).
Pour plus d’exemples : Écriture inclusive : reformulations
Pistes de solutions inclusives pour remplacer des mots genrés :
Inclusionnaire : recueil de solutions inclusives (Gouvernement du Canada)
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Doublets abrégés
Les doublets abrégés ont recours à un signe typographique pour indiquer l’utilisation simultanée de la forme féminine et de la forme masculine d’un mot. Bien que ce procédé de plus en plus répandu ne fasse pas l’unanimité, il tend à être plus neutre que les doublets complets qui s’inscrivent dans une logique de binarité femme-homme.
Lorsque l’emploi est justifié, le gouvernement fédéral privilégie le point médian (·) comme signe typographique. Toutefois, il recommande d’employer les doublets abrégés avec prudence puisqu’ils risquent de compromettre la lisibilité et l’accessibilité d’un texte, créant des barrières qui risquent d’exclure notamment des personnes qui utilisent des logiciels de lecture.
Pour en savoir plus : Écriture inclusive : doublets abrégés
Extension pour faciliter l’utilisation du point médian :
Ecriture·Inclusive·Facile — e·i·f (Chrome web store)
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Néologismes
Étant donné que le genre neutre n’existe pas dans la grammaire française, la création de néologismes cherche à représenter équitablement les personnes non binaires.
De nouveaux pronoms, accords grammaticaux, titres de civilité et autres mots neutres font leur apparition. Parmi les pronoms non binaires, le pronom iel est reconnu par le dictionnaire Le Robert, alors que les personnes 2SLGBTQIA+ font preuve d’une grande agentivité linguistique en créant une variété de pronoms pour se représenter (dont ille, ielle, yel, al, ol, et ul).
Même s’il y a un faible consensus à l’égard des néologismes, il est important de respecter et d’employer les pronoms et les accords grammaticaux auxquels une personne s’identifie. Lorsque des néologismes sont inclus dans un texte, le gouvernement fédéral suggère simplement d’ajouter une note explicative permettant d’expliquer la démarche en matière de langage inclusif.
Pour en savoir plus : Écriture inclusive : communications relatives aux personnes non binaires
Exemples de néologismes :
Le français non-binaire et inclusif (Kris Aric Knisely, Ph.D.)
Il est important de reconnaitre que, de manière intentionnelle ou non, le langage peut exclure des personnes appartenant à des communautés identitaires marginalisés. Par exemple, les personnes Noires, Autochtones et de couleur ont été historiquement exclues, mal représentées et blessées par des paroles et des textes écrits.
Il est donc essentiel de porter attention et de réfléchir au choix des mots et des contenus qui sont communiqués afin de représenter de manière respectueuse et équitable toutes les identités.
Les principes de l’écriture inclusive et antiraciste selon Simon Fraser University :
- Remettre en question les hypothèses, les généralisations et les normes perçues.
- Choisir des mots de manière réfléchie et prudente.
- Solliciter les commentaires des personnes externes qui ont des expériences variées.
- Recevoir les commentaires constructifs, apprendre et s’améliorer.
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Ressources complémentaires
- Guide de la terminologie liée à l’équité, la diversité et l’inclusion (Gouvernement du Canada) : Termes et de concepts liés à l’équité, la diversité, l’accessibilité et l’inclusion.
- Lexique sur la diversité sexuelle et de genre (Gouvernement du Canada) : Renseignements terminologiques et équivalent anglais des termes liés à la diversité sexuelle et de genre.
- Les miroirs et les fenêtres : une analogie valorisant la diversité (CSF Bienveillance) : Article qui aborde l’importance de la représentation des identités et de la diversité.
La plupart des pistes d’action ci-dessous proviennent de l’atelier Comment enseigner, évaluer et promouvoir le français inclusif (SOGI+), animé par Elizabeth Rush (yel/el), leader SOGI à l’école Victor-Brodeur, lors du Rond-Point 2023 du CSF.
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Souligner et valoriser l’évolution de la langue
- Aborder explicitement l’évolution de la langue à travers le temps et les lieux pour permettre aux élèves de comprendre que le français répond aux contextes et aux besoins qui sont propres à des communautés particulières.
- Célébrer le leadership du Québec, à l’échelle mondiale, en matière de féminisation des noms de métiers.
- Souligner que, si les pronoms neutres semblent un phénomène récent pour les personnes parlant le français, ce n’est pas le cas pour l’ensemble des communautés ayant interagi avec la langue. Par exemple, la langue michif de la Nation Métis et le créole haïtien disposent de pronoms neutres depuis des centaines d’années.
- Explorer avec les élèves les implications du Code des droits de la personne en Colombie-Britannique par rapport à l’usage, l’enseignement et l’évaluation des langues. Inviter les élèves à décrire l’interconnexion entre l’apprentissage d’un français SOGI-inclusif et le développement de leur littératie sociale et civile.
- Lire et annoter des articles abordant le fait que la grammaire est étroitement liée à l’univers social et politique et qu’elle peut avoir un impact, bien documenté, sur la santé mentale et le sentiment d’appartenance des jeunes.
- Rédiger des commentaires ou des textes créatifs en utilisant les ressources créées par le gouvernement fédéral, soit les Lignes directrices sur l’écriture inclusive et l’Inclusionnaire : reccueil de solutions inclusives, pour favoriser une représentation équitable de toutes les personnes au Canada, à l’oral et à l’écrit.
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Promouvoir un usage consensuel de la langue française
- Modéliser des stratégies de quête et de respect du consentement, par exemple :
- Développer la confiance et les stratégies linguistiques pour demander les pronoms, les titres de civilité, les termes professionels et les accords que les personnes utilisent pour se représenter;
- S’efforcer d’utiliser les termes et les accords auxquels une personne s’identifie et apprendre à s’excuser efficacement lorsque des erreurs sont faites;
- Pratiquer à l’oral des formulations neutres et inclusives devant des groupes et des nouvelles personnes;
- Pratiquer des procédés d’écriture inclusive dans les textes rédigés à l’école.
- Sensibiliser les élèves à l’importance de la représentation de tous les genres, autant à l’oral qu’à l’écrit.
- Déconstruire les stéréotypes et valoriser l’expression des diverses identités.
- Permettre aux élèves de s’approprier divers procédés de l’écriture inclusive à travers la modélisation explicite.
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Valoriser l’écriture inclusive à travers la modélisation et l’évaluation du français
- Expliquer de façon explicite la différence entre le genre grammatical des objets et le genre social des personnes. Préciser que, si on a tendance à croire que ces deux formes de genre sont déconnectées, l’histoire des titres de métier nous montre que ces deux univers peuvent se chevaucher.
- Ajouter des pronoms non binaires aux tableaux de pronoms et de conjugaison et offrir, à l’oral, des exemples de phrases où on entend des pronoms non binaires.
- Enseigner le sens des doublets et alterner l’ordre du féminin et du masculin pour éviter de hiérarchiser les genres.
- Inviter les élèves à remarquer les stratégies utilisées dans les articles de presse pour respecter la façon dont une personne représente son identité de genre à l’écrit, dont la note explicative paratextuelle (ex : article de Radio-Canada).
- Afficher une variété d’outils qui modélisent et normalisent les stratégies inclusives (voir le dossier SOGI French resources).
- Lors de l’enseignement des accords entre les sujets, les adjectifs et les participes passés, dévoiler aux élèves l’existence de plusieurs règles d’accord, comme l’accord de proximité et l’accord au choix. Donner aux élèves le choix de leur règle d’accord et la possibilité d’exprimer, dans un paratexte précédent leur travail écrit, quelle règle est utilisée dans le texte.
- Proposer aux élèves des exercices de reformulation inclusive d’un texte qui utilise des termes et des accords genrés. Pour faciliter ce travail, fournir les outils l’Inclusionnaire : recueil de solutions inclusives et la Liste de termes épicènes ou neutres.
Guides en matière d’écriture inclusive
- Écriture inclusive – Lignes directrices et ressources (Gouvernement du Canada)
- Communication inclusive : Mode d’emploi (CDEC de Québec)
- L’inclusivité des genres en français (gegi.ca)
- Guide de communication inclusive (Université du Québec)
- Guide de grammaire neutre et inclusive (Divergenres)
- Guide pour la rédaction inclusive à l’Université Laval (FEMUL)
- Langage inclusif : Guide pour les écoles et milieux de travail au Manitoba (The Manitoba Teacher’s society)
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Outils d’aide à la rédaction
- Inclusionnaire : recueil de solutions inclusives (Gouvernement du Canada)
- Liste de termes épicènes ou neutres (Office québécois de la langue française)
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Résumés de stratégies
- Langage inclusif et non-genré : Créer des liens grâce au langage (TransCare BC)
- Non-binary and inclusive French – Oral communication strategies (Kris Aric Knisely, Ph.D.)
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Articles
- L’écriture inclusive sous la loupe de la science (Radio-Canada)
- Mythes sur l’écriture inclusive (Blogue Nos langues)
- Utiliser un langage respectueux de la pluralité des genres (L’Autre Ortho)
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Webinaires
- Le français inclusif – pourquoi et comment on l’utilise – Partie 2 (Comité FrancoQueer de l’Ouest, accessible via l’intranet du CSF)
« Sachez que peu importe la stratégie que vous utilisez pour rendre vos communications inclusives, vous participez à créer des milieux plus sécuritaires pour les personnes non-binaires et plus accueillants pour tout le monde ! » – Divergenres (p. 12)